dimanche 27 mai 2018

La conception selon laquelle la légende du Phénix exprimerait la conception du réel est fausse, car elle implique que le réel recommence et toujours sous la même forme. Or le réel ne recommence jamais et se montre toujours sous une forme nouvelle. Le réel est éternel ne signifie pas qu'il renaît de ses cendres, mais qu'il se renouvelle toujours.

vendredi 24 mars 2017

"Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes."
Bossuet.

Pour ne citer que le causalisme, on est tenté dans notre raisonnement d'estimer que l'origine contient la vérité. Mais en fait, on peut parler de mythe des origines. On peut dire que tous les philosophes depuis les présocratiques se targuent d'avoir produit cette origine qui explique le monde. Autrement dit, on ne peut expliquer que si on fournit la cause, qui n'est pas seulement la cause de l'explication, mais qui est la cause originelle, essentielle et ultime - indépassable. La simple cause de l'explication serait circonstancielle, c'est-à-dire qu’elle est nécessaire au sens d’inamovible, mais qu'elle donne lieu à un effet qui lui est supérieur, donc que son rôle est secondaire; tandis que la cause essentielle est l'origine du monde.
C'est en ce sens que Descartes donne comme origine Dieu, Nietzsche, qui est resté un métaphysicien la volonté de puissance, ou Hegel l'Esprit. C'est toujours en ce sens que tant de philosophes, comme Hobbes, Rousseau ou Schopenhauer, ont développé des théories du contrat fondées sur l'état de nature, dont le propre est d'exprimer une origine fictive. 
C'est la preuve qu'on a besoin d'une origine pour mieux assoir le développement de la pensée, même si on sait très bien que cette origine est fictive. On serait plus avisé de se rendre compte qu'au fond, toute origine, et pas seulement celle-là, s'avère relever de la mythologie. Mais en a-t-on tant besoin que cela?
Si l'on veut comprendre pourquoi l'origine du monde n'existe pas, c'est parce que l’origine n'existe qu'au niveau de l'être : le propre de l'être est sa finitude. L'erreur du transcendantalisme n'est pas de chercher une origine dans l'être, mais d'hypostasier l’Être, de telle sorte que l'on ne comprend plus trop comment l’Être pourrait ne pas être à l'origine de tout, bien qu'on ne parvienne à l'expliquer. On ne fait que rendre légitime un discours dont l'erreur fondamental l'entraîne vers des développements de plus en plus faux, à mesure qu'il refuse précisément de se sortir de l'ornière initiale à laquelle il a souscrit.
Et pour cause : si l'on suit le raisonnement humain, il est impossible de comprendre que l’Être soit l'origine, puisque l'origine telle que nous la comprenons nécessite toujours une cause, quelque chose qui la précède. Cette régression à l'infini, qui connote un raisonnement de type cercle vicieux, engendre des positions comme l'arationalisme ou l’irrationalisme - en tout cas, l'idée générale selon laquelle, puisqu'on ne peut comprendre l’Être, c'est le signe qu'il existe une disjonction entre l'être et l’Être, de telle sorte qu'a minima, l'être ne peut comprendre l’Être (la compréhension est unilatérale, du côté de l’Être).
Mais ce n'est pas la faculté de compréhension de l'homme qui est en question. C'est le modèle transcendantaliste dont il refuse de changer par commodité et habitude qui est erroné. S'il le change, il tombe sur l'idée que le réel est formé de manière non pas homogène, sur le modèle du prolongement être/Être, mais de manière différente, avec une partie complémentaire de l'être qui n'est pas de l'être.
Du coup, l'origine n'a pas de sens, car c'est une question qui n'a de logique que dans le cadre de l'être. Mais pour la comprendre, il est possible de recourir à l'intelligence humaine, ce qui montre que l'on n'ait pas constitué que d'être, sans quoi nous ne pourrions comprendre ce qui n'est pas de l'être.
Figurons-nous que ce soit une propriété comme la malléabilité qui soit le complément de l'être. Déjà, l'origine n'a aucun sens, puisque l'être désigne un état, quand la malléabilité est une propriété. Ensuite, le propre de ce qui est malléable est de ne pas accepter d'origine, puisqu'il est étirable, adaptable, plastique, mouvant, de telle sorte qu'il se déploie d'une manière qui ne supporte pas l'idée même d'origine.
L'origine a un sens dans l'être, pas de sens dans la malléabilité. Dès lors, le réel comme composé d'être et de malléabilité se comprend comme ce qui n'est pas créé, et ne peut l'être, mais comme ce qui est nécessairement instantané et concomitant. Quand on se figure qu'il est une origine au réel, on décompose le réel d'une manière qui nous permet de mieux l'appréhender rationnellement, mais qui ne répond pas au réel, dont le propre est de n'avoir ni origine, ni fin, si l'on incorpore le critère de malléabilité en plus de la représentation reconnue de l'être.
Il faudrait parler de simultanéité de l'être, ou de concomitance, de telle sorte que le temps se donne comme la décomposition de la simultanéité en parties finies dont le nombre est infini, puisque l'infini exprime en termes de finitude la décomposition de la malléabilité. 
Si l'origine n'a de valeur que dans la finitude, alors la démarche des philosophes qui ont besoin d'inventer l'état de nature s'explique comme une méthode des plus ingénieuses : il s'agit en effet de recourir au seul moyen qui consiste à penser les origines comme une fiction néanmoins indépassable et incontournable, selon notre logique bornée, de telle sorte que l'on a besoin de créer un avant l’origine, aussi absurde que le geste paraisse, si l'on veut penser l'origine (cette approche est plus large qu'un geste relevant seulement de la philosophie politique : elle exprime le problème cardinal de la connaissance du réel, l'épistémologie au sens le plus large, englobant de loin la question scientifique, et aussi la philosophie, pour être la question de la pensée).

samedi 4 mars 2017

Pourquoi ne sait-on pas pourquoi nous existons? Si Dieu existe? S'il y a quelque chose après la mort et si tel est le cas, quoi? Toutes ces questions indiquent manifestement que Dieu ne saurait être en prolongement de l'être, sans quoi nous devrions le connaître. C'est l'argument des athées et des matérialistes : Dieu n'existe pas, puisqu'il n'est pas en prolongement de l'être. Nous ne pouvons que logiquement être d'accord avec ce raisonnement, sauf qu'il reste une possibilité que l'athée se garde bien d'explorer : et si ce qu'on nomme Dieu n'était pas en prolongement? S'il était différent? Alors son existence redevient non seulement possible, voire probable, mais en plus, on tient une explication au fait qu'on ne le connaît pas et que d'une manière générale, les questions d'ordre religieuse ou métaphysique (selon l'acception ordinaire, pas selon le sens que lui accordait Aristote et ses successeurs) ne trouvent pas de réponses.

dimanche 11 décembre 2016

Dieu n'est pas ce qui existe déjà, mais ce qui devrait être représenté comme ce qui est à venir, et qui n'existe donc pas. Le propre du réel n'est pas d'avoir été ou d'être en ce moment (ici et maintenant), ce qui n'est qu'une présence soumise à la négativité ou promise à l'être bientôt. Le plus intrigant est que ce qui est se situe devant, au sens où il n'est pas déjà, mais où il s'avance en promesse indubitable, quoique incertaine. Au sens propre, l'être est un terme impropre, puisque seul l'être au futur existe, un sera aussi nécessaire qu'imprévisible (sa liberté réside dans ce deuxième attribut).
Mais l'être qui est devant n'est pas déjà écrit au futur, ce qui n'a guère plus de sens que la croyance selon laquelle l'être est déjà écrit au passé. Cela signifie tout simplement qu'il n'existe pas d'origine, mais qu'il convient plutôt de supprimer la quête des origines, comme un mythe introuvable - raison pour laquelle on l'a tant cherché et on ne l'a jamais trouvé.
L'être n'existe qu'à l'état de succédané instantané et ne vaut donc que si on le conçoit au futur. Si on le conçoit au passé on recrée une situation qui est artificiellement concevable, mais qui a l'inconvénient majeur de l'isoler, au sens chimique, de la manière complexe dont il se déploie et se manifeste : car l'être ne se manifeste que de manière simultanée et concomitante (cet terme convenant peut-être mieux), selon un processus dans lequel il n'est pas d'être sans l'adjonction de la faculté différente de malléabilité.

mardi 22 novembre 2016

Qu'est-ce que les premiers temps? Si c'est le début, c'est de l'être, marqué par le temps. Qu'est-ce que le temps? C'est précisément ce qui définit l'être. Donc le début des temps n'existe pas, puisqu'il y a temps dès qu'il y a être. Par contre, l'avènement de l'être ne vient pas d'autre chose qui lui préexiste et lui est donc supérieur - le raisonnement de Descartes est aussi celui de toute la mentalité du transcendantalisme, selon laquelle l’Être vient compléter l'être (le parfait l'imparfait), car dans le règne de l'homogénéité, il ne peut y avoir d'autre option. Il s'explique par la concomitance ou simultanéité de l'être/malléabilité, selon laquelle il ne peut y avoir de malléabilité sans être, ni vice versa. Du coup, l'être survient sur la malléabilité, ce qui fait qu'il n'y a plus besoin de début, d'origine, puisqu'il est remplacé par le caractère flottant et toujours en ajustement. Cela explique que l'être n'ait pas besoin de début, puisque le début inhérent au temps est remplacé par l'indétermination.
Reste à préciser que cette explication ressortit de l'approximation autant que de la reconstitution. Car si l'on se situe dans la simultanéité, ce que l'on décortique tient en réalité dans le même moment, ce qui rend encore plus explicable l'absence de début et de fin. La malléabilité permet vraiment d'expliquer que l'infini n'ait pas de fin, comme de sortir de la régression à l'infini, sur la rengaine : l’œuf ou la poule? Mais nous ne pouvons pas expliquer la malléabilité sans l’être, soit dissocier les deux compléments l'un de l'autre, d'autant qu'en régime de malléabilité, il ne peut y avoir de complément qui fonctionne que s'il n'est pas prolongement de type homogène, mais différence de type hétérogène. Dès lors, on tient une explication qui change par rapport à l'hypothèse transcendantaliste, qui n'a jamais été une certitude, quoi qu'elle prétende, mais qui empêche de comprendre le positif au-delà du fini.

dimanche 30 octobre 2016

Qu'est-ce que Dieu? C'est celui qui s'il existe donne du sens. Mais il n'est pas nécessaire qu'il y ait un Dieu pour qu'il y ait quelque chose. Ainsi, Dieu n'est pas nécessaire, mais la nécessité serait qu'il y ait un ordre matériel dont le principe de perpétuation serait inhérent si l'on veut. C'est étrange, mais ce serait possible. Dès lors, Dieu viendrait se surajouter au nécessaire et ne serait pas le nécessaire, mais l'améliorateur. Il serait celui qui pourrait ne pas être et dont le but serait d'être plus que le minimum nécessaire.
Il n'est pas besoin de chercher à définir un début à l'être, dans une forme de régression à l'infini, car la conception d'un début et d'une fin ressortit typiquement du raisonnement interne au fini, donc à l'être. Il convient en conséquence que l'être ne soit pas causé par une cause, mais par une substance complémentaire qui fonctionne comme quelque chose qui se contracte et s'étend sans début ni fin. Autrement dit, il importe qu'il n'y ait ni début ni fin au réel, mais qu'il faille changer de conception pour mieux l'appréhender.