lundi 1 février 2010

Dire que le néant n'existe pas à l'état pur, c'est couper l'herbe sous le pied des nihilistes. Pourtant, les nihilistes ont fait une découverte. Ils l'ont mal exploitée. Leur trouvaille se manifeste dès l'Antiquité, quand germe le monothéisme et que bouillonne en réaction la crise sophiste. Leur innovation, c'est le néant. Le néant existe. Ils veulent dire : la complétude de l'Être n'existe pas. Ce qu'ils prennent pour du néant pur n'est pas du néant pur. Mais leur approche nihiliste possède le mérite de dégommer le mythe de la complétude contenu dans le Dieu unique et dans son jumeau ontologique l'Être. L'erreur nihiliste est plus importante que l'erreur qu'ils dénoncent dans le transcendantalisme : le transcendantalisme est viable malgré son erreur de la complétude; quand le nihilisme n'est pas viable à cause de sa croyance diabolique dans le néant (en tant que néant). Le nihilisme ne fait que transposer l'erreur de la complétude en y ajoutant son néant en lieu et place de Dieu. Le nihilisme déplace tant le débat qu'il le place sur le terrain de la philosophie pure (ontologie) en faisant mine de dépasser radicalement la forme religieuse dépassée. En réalité, le nihilisme continue d'adhérer à l'erreur transcendantaliste de la complétude, en l'aggravant radicalement. Le nihilisme est l'expression de l'erreur radicale. Il postule que la complétude existe - puisqu'elle correspond au néant. La complétude n'existe pas. Telle est l'approche néanthéiste : le néant n'existe pas en tant que tel, mais en tant que mélange constant de la forme incomplète du néant avec les formes complémentaires et incomplètes de l'être.
C'est dire que le néant est incomplet et que toute forme de réel est incomplète. Une précision : l'incomplétude ne signifie pas l'inexistence ou la nullité. Elle indique que l'infini n'existe pas. L'infini est inconcevable parce que l'infini n'existe pas. L'infini est incomplet. La seule chose qu'il faut ajouter pour saisir la structure de l'ordonnancement, c'est que si le néant n'existe jamais à l'état brut, par contre le principe de l'incomplétude implique que l'ensemble de tous les ordres finis ne correspondent jamais à un ordre figé, stable et non changeant. La présence de l'infini incomplet explique le caractère entropique du réel : le réel croît parce qu'il repose sur une structure d'incomplétude qui permet toujours le changement. A noter que l'incomplétude du néant implique le principe de croissance par diminution, alors que le principe classique du prolongement supposait que l'on croisse en augmentant.

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